samedi 2 août 2014

Le cochon à Futuna

Ce qui interpelle en premier lieu lorsqu'on se promène sur la route circulaire de Futuna, c'est l'odeur pestidentielle qui émane des porcheries installées soit à proximité des maisons soit légèrement en retrait mais jamais trop loin.

Pélénatita, ma voisine possède une porcherie à environ 200m de son habitation. Située côté mer, c'est l'une des rares à n'avoir aucune maison à proximité.

Un peu d'histoire....

Le cochon ou puaka a toujours été un élément fondamental dans la vie des futuniens. Dans le passé, un homme qui cultivait la terre et élevait des cochons, était considéré comme riche. C'est l'un des aliments essentiels avec l'igname et le tarot. On le retrouve à l'occasion d'évènements appelés katoaga qui peuvent être d'ordre religieux (lors de toutes les fêtes religieuses), publics (intronisation, nomination d'un nouveau préfet... ) ou encore privés (mariage, baptème, communion..). Les cochons sont exposés, dos contre terre, les pattes en l'air, évicérés, farcis de troncs de bananier, la peau est grillée. Ils sont peu cuits. A la fin de la cérémonie, ils seront distribués et consommés recuits par les acquéreurs. Ces cérémonies se préparent longtemps à l'avance afin de permettre d'alimenter les bêtes, les engraisser, de planter et cultiver les tubercules.



 Ces cérémonies reflètent la position institutionnelle des hommes au sein du royaume. Plus l'homme est important, plus son cochon sera gros et occupera le premier rang. Il y a le rang des gros, des moyens et des petits. Chaque cérémonie est l'occasion de se positionner simplement par la taille de son cochon. Les plus gros pouvant aller au delà de 300 kg. Chaque famille fournie des porcs. Petits ou gros. S'ils n'ont pas les moyens d'en avoir, d'autres membres de la famille doivent se cotiser afin d'en acquérir un. Le prix moyen pour un gros porc est d'environ 2500 à 3000 euros.


Aujourd'hui l'argent a tout changé. Un homme qui travaille et qui a une bonne rentrée d'argent est un homme riche car plus il a de l'argent plus il a de cochons puiqu'il peut acheter de quoi les nourrir.

Pélénatita a découvert lorsqu'elle faisait mon collier pour la messe du 29 juillet, que je pouvais mettre des photos sur son ordinateur (qui sert de lien par skype avec sa fille par partie faire des études à Toulouse) et m'a demandé de la photographier dans sa porcherie. Je ne pouvais refuser.

Pelenatita a une porcherie alimentée en eau, d'environ  40 bêtes. Il n'y a pas de race particulière. Nous en trouvons des gris tachetés, des noirs, des rose. Il y en a de toutes les tailles.





Elle estime son plus gros cochon à 300 kg. Il est agé de 4 ans et est engraissé pour les fêtes de fin d'année.


Son plus petit est âgé d'à peine 1 mois. Il est encore avec sa mère. La portée était de 5 mais les autres sont morts après être tombés de l'autre côté de la clôture et cela ne semble pas déranger Pélénatita qui estime en avoir assez.


Les porcs bien que dans un parc très réduit, sont sur un sol bétonné, ce qui n'est pas le cas dans toutes les porcheries. Elle peut ainsi nettoyer à grande eau les enclos ainsi que les bêtes. 



Elle se dit concernée par les cas de leptospirose très important sur l'île. Si elle n'entretient pas correctement les enclos, les rats vont venir en nombre et transmettre la maladie aux cochons qui en urinant souilleront le sol et pourront ainsi  transmettre la maladie à l'homme. Elle ne se rend jamais dans sa porcherie sans ses baskets. Après avoir bien débarrassé les enclos des excréments des cochons, elle distribue la nourriture. Leur alimentation est principalement  faite à base de céréales vendues en sacs de 25 kg qu'elle achète en moyenne 2500 fs (22 euros) à la supérette du coin et en provenance des Iles Fidji. 


Lundi dernier, je l'ai raccompagnée chez elle car elle venait d'acheter 10 sacs et attendait son mari qui tardait à venir. Je l'ai aidé à transporter et livrer ses sacs, 3 à la porcherie et 7 à son domicile. Elle utilise un sac par jour si les céréales sont accompagnées de fruits (bananes, papaye, fruit de l'arbre à pain, coco) ou encore de feuilles (tarots, manioc, ignames..). Sinon tous les restes sont également gardés pour les nourrir. Comme tout est bon dans le cochon, rien n'est perdu, on leur donne même les os des leurs....

Elle effectue cette corvée qui lui prend 1 heure 30 environ, deux fois par jour et tous les jours. Pas de répit.

Une fois par mois, son mari fait un umu avec un porcelet d'une quinzaine de kilo, qu'il offre aux habitants qui sont nommés à tour de rôle pour la restauration de l'église de Tuatafa. Les ouvriers des églises sont nourris gratuitements par les habitants des localités. 

On a estimé en 2011 qu'il y avait entre 10 000 et 15000 porcs sur Wallis et Futuna.



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